jeudi 15 mai 2025

« Catherine, Paris, 12 septembre 2024 (Fuji Instax Wide Monochrome) »

 


                                                          © Yannick Vigouroux

 

 

 

Thierry Girard déclare à propos de ses photographies réalisées en Chine (cf. le remarquable Dans l’épaisseur du paysage, éditions Loco, 2017, coécrit avec Yannick Le Marec) : « Un portrait, c’est un échange instantané qui nécessite un peu de tension et d’inquiétude réciproques (un "quickie" comme on disait autrefois pour désigner un acte sexuel rapide). »

 

Déclencher avec un flash est comme une décharge électrique, sur la surface du film à développement instantané l’apparition en quelques minutes de l’image est en revanche d’une douce lenteur… J’aime ce paradoxe.

 

Ma vision est, je le reconnais, idéalisante, mais sans esthétisme, un travers de la photographie plasticienne actuelle dite « pauvre » — j’ai inventé le concept de « Foto Povera » avec Rémi Guerrin en 2005 — dont je me méfie beaucoup, et n’espère pas avoir été un des instigateurs…

 

Les jambes des femmes sont selon François Truffaut « des compas qui arpentent le globe terrestre en tous sens et lui donnent son équilibre et son harmonie » ; celles de mes modèles sont souvent bottées, fétichisme qui hante aussi mes photographies de rue et de métro et que j’assume pleinement (Pour Truffaut rappelons-le, il s’agissait des chaussures à brides).



 

mercredi 14 mai 2025

« Ma donation à l’ARDI-Photographies (Caen) sur le Réseau des Musées de Normandie »

 

 


 

Une partie de ma donation en 2011 de ma production argentique durant 25 ans à l’ARDI-Photographies (Caen) est désormais visible sur le Réseau des Musées de Normandie…

https://www.musees-normandie.fr/

mardi 29 avril 2025

« Les images expérimentales d’une géopoétique des lisières » par Christian Gattinoni




Les images expérimentales d’une géopoétique des lisières 

« Dans un monde saturé d’images qui circulent et sont
consommées à la vitesse des réseaux, les photographes de
plusieurs générations se posent la question de ce qui peut
résister dans leur travail et faire œuvre. Conscients des
menaces pesant sur la culture et l’art dans notre pays travaillé
par les banalisations des idéologies d’extrême droite, les
instances professionnelles s’organisent, d’où l’importance des
réseaux Diagonal et plus récemment Lux ou d’associations
comme Les filles de la photo. Sur le terrain dans différentes
régions, il ne faut pas oublier l’action essentielle de structures
comme l’ARDI-photographies active depuis 1984 à Caen.
Yannick Vigouroux, ayant ses racines en Normandie, leur a fait
une donation dont ils ont entrepris la numérisation et l’inventaire - contacts couleur, noir et blanc et négatifs de sa production argentique des 25 ans écoulés.

Yannick Vigouroux est l’explorateur conquérant de tous les
seuils techniques et sensitifs du monde visuel. En se
positionnant contre l’hypertechnologie et pour l’expérimentation tous terrains, il assume une position quasi philosophique, mais aussi éthique. On peut en établir les pôles à l’intersection des théories de Vilém Flusser (1920-1991) et de la géopoétique de Kenneth White (1936-2023). Pour rendre  hommage au philosophe brésilien, Marc Lenot a publié son essai Jouer contre les appareils (2017) y défendant la photographie expérimentale qu’il définit non comme un courant mais « un moment entre le déclin de la photographie analogique documentaire traditionnelle et l’avènement de la photographie numérique ». Yannick en est un acteur toujours dynamique, militant de la foto povera, qui a su avec ses sténopés numériques négocier habilement ce passage d’un siècle à l’autre.

Par ailleurs son territoire mental étant lié à sa Normandie natale, il en partage les ressentis jusqu’à titrer ses œuvres Littoralités comme celles défendues par l’écrivain écossais des Archives du littoral dont il partage « le but de la géopoétique de renouveler chez l’être humain la perception du monde, de densifier sa présence au monde ».

Avec l’horizon comme limite mentale et terrain de pratique
iconique et le recours à la distance la plus intime au site, il se
donne tous les moyens artistiques d’une approche renouvelée
du paysage côtier. S’il revendique un héritage pictural, il est
logiquement normand avec Eugène Boudin (1824-1898) connu pour ses marines et scènes de plage et surtout comme le premier à quitter l’atelier pour le motif en extérieur. Beaucoup de ses toiles présentes au Musée du Havre (Muma) sont de petits formats. Le peintre revendiquait dans le respect des ciels « l’étude de la grande lumière et du plein air. » Pour se confronter à la matérialité du terrain et en restituer une vision atmosphérique, le photographe utilise sa box 6x9 cm pour sa légèreté et l’absence de contrôle qui le soumet à l’exigence de la lumière ambiante. Connaissant les dangers d’une banalisation esthétique de l’abstraction photographique,  il sature son cadre d’une géométrie incarnée. Les matériaux qui en gèrent la composition entrent à parité avec les rares silhouettes humaines qui y apparaissent en filigrane suggérant son devenir scénographique.

Même si le vignettage accentué de certains bords de cadre
pouvait laisser craindre l’instauration d’une distance, il nous
replace dans la situation de prise de vue au plus près des
éléments et de leur réel. Le traitement de la couleur à travers la sensualité des tirages contribue à cet effet prégnant.
Prolongeant la logique de la foto povera découlant de
l’imperfection de l’outil, il ne cède pas à la trésorisation muséale du statut d’œuvre en gardant le plus souvent le format modeste de 24 x 30 cm, nous obligeant là encore à une vision de près. La force de cette œuvre est de ne pas chercher à  retranscrire l’horizon dans une géométrie lignée héritée de la traditionpicturale, mais en noyant le cadre d’une couleur qui en  donne le sentiment à proximité, ce bleu saturé marque une présence météorologique de ce confin inatteignable… En se positionnant sur les seuils de l’espace marin, dans l’expérimentation de nouvelles lisières, Yannick Vigouroux accepte la gestion des obstacles visuels créés par les actions humaines sur le bâti qui viennent perturber la pure ligne de l’horizon. »

Christian Gattinoni, texte d’exposition.


mercredi 16 avril 2025

« Underground 2.0 »

 


                          Photo © Yannick Vigouroux



« Vingt ans ont passé depuis mes premières photographies hyper-pixellisées dans le métro parisien, montées en séquences sur des cartons (certaines prises avec des compacts numériques autour de 2008) et celles réalisées au smartphone – véritables micro-ordinateurs polyvalents – aujourd’hui. Vingt-quatre ans ont passé aussi entre mes premières photographies en noir blanc lomographiques et argentiques, faites au jugé en 2000, sans viser et les images d’aujourd’hui…

 

Dans ces laps de temps, ce sont de véritables révolutions du regard et du comportement humain qui ont eu lieu. Il est devenu contrairement à il y a un quart de siècle si facile de prendre une photo – d’ailleurs nombre de jeunes usagers ne s’en privent pas et multiplient les selfies, quand ils ne pianotent pas compulsivement leurs SMS ou consultent des sites, accros à Facebook, Instagram et Tik-Tok. Les gens ne se regardent plus et ne lisent plus que rarement des livres ou des journaux, absorbés littéralement qu’ils sont par leurs minuscules écrans ! […] »

 

Extrait d’un texte à paraître dans TK-21

jeudi 27 mars 2025

" Nos Paris critiques [de lacritique.org]", éditions Naima, mars 2025

 



« L’instant d’un espace, tout n’est plus entièrement terrestre et pas encore complètement marin. Là est l’image à la frontière des profondeurs de la surface photographique, en tension dans l’encadrement noir, incandescent, éraflé d’effractions lumineuses, frappé du nom du film ; en capture du moment et de la distance où tout se joue dans la variabilité de l’en-deçà et de l’au-delà de l’horizon. Le mot lui-même de Littoralités, inspiré de la géopoétique de Kenneth White, fait aujourd’hui sens dans les écrits de géographes qui analysent ces espaces aux limites changeantes. »

Jean-Marie Baldner, extrait de « Yannick Vigouroux, Littoralités. Le plaisir de l’image » in Nos Paris critiques [de lacritique.org], éditions Naima, mars 2025.

Moi-même critique d'art pour www.lacritique.org, je consacre dans cet ouvrage mes paris critiques à Driss Aroussi et à Bruno Debon, deux piliers de la Foto Povera.